Hommage à Philippe Rapeneau
C’est avec une immense tristesse que j’ai appris le décès du président de la Communauté Urbaine d’Arras, Philippe Rapeneau, mort à l’âge de 60 ans, le 31 juillet sur son lieu de vacances.
Au-delà du drame humain qui n’appartient qu’à sa famille et à ses proches, c’est une disparition immense pour notre territoire. Très actif dans le développement durable, les transports, les politiques de logement, le développement économique et la promotion du tourisme, finalement peu de sujets lui échappaient et il s’y investissait avec une impressionnante énergie.
Pendant ces sept années passées à travailler à ses côtés, j’ai découvert un homme extrêmement sensible et viscéralement attaché au développement de notre territoire et à ses habitants.
Pourtant notre relation n’avait pas bien débuté. Élu en octobre 2011 à la présidence, il m’avait retiré le budget alloué au développement du numérique (5 millions d’euros) pour l’affecter à d’autres projets. La tension était montée et j’avais adressé à l’époque une lettre à l’ensemble des élus communautaires. Interrogé par la presse sur la lenteur de l’aménagement numérique de notre territoire, j’avais expliqué que le président m’avait retiré le budget pour le consacrer à des sujets qui lui tenaient plus à cœur, comme des politiques de boisement ou la protection de la biodiversité. En lisant l’article, Philippe Rapeneau était entré dans l’une de ses légendaires colères et nous nous étions fermement disputés, chacun campant sur ses positions.
Ma sanction fut sans appel, deux jours après je recevais par huissier mon retrait de délégation aux nouvelles technologies. Je fus le premier et sans doute le seul vice-président à avoir eu un retrait de délégation pendant son mandat de président. Ce fut la stupéfaction dans le rang des élus et beaucoup s’interrogèrent sur sa façon d’agir avec les maires du territoire.
Toutefois ce fut l’occasion de découvrir le « phénomène Philippe Rapeneau ». Sa décision était initialement motivée par le fait qu’il n’y connaissait pas grand-chose en matière de numérique et qu’il ne voyait pas l’intérêt d’investir autant d’argent dans son développement. Néanmoins même s’il ne laissait rien transparaître, cette dispute l’avait interpellé et il s’était complètement imprégné du sujet. Pendant ma suspension, il avait été à la rencontre de nombreux acteurs du numérique, il avait questionné le directeur de l’ARCEP (autorité de régulation des télécommunications) à Paris pour savoir si ce que je lui avais raconté était légitime et réaliste. Il avait une capacité d’absorption d’informations véritablement surprenante. Novice quelques semaines auparavant, il s’était complètement approprié la thématique des enjeux du numérique. Puis quelques semaines après m’avoir retiré ma délégation, il me l’a rendue.
La réconciliation avec Philippe Rapeneau s’est déroulée au cours d’un repas. Il a reconnu qu’il s’était « un peu emballé » mais qu’il avait compris les enjeux pour notre territoire. Ce jour-là il m’a bluffé par la maîtrise de son sujet. Sourire aux lèvres, il m’a dit « bon j’ai tout recalculé avec les services, cinq millions c’est trop, on va te rendre 3,4 millions pour l’aménagement numérique. Et pour la fibre optique, je compte sur toi pour suivre ça de près, moi je vais agir au niveau régional… ». Au final l’aménagement coûta 3,2 millions d’euros, Philippe Rapeneau s’impliqua comme président du syndicat mixte de la Fibre 59/62 et défendit nos intérêts comme jamais. Il devint en 2016 vice-président de la région des Hauts-de-France en charge de la 3ème révolution industrielle, une délégation où le numérique est omniprésent.
Philippe Rapeneau était comme ça, entier et sensible, beaucoup plus attentif aux autres qu’on ne peut le penser avec une capacité de rassemblement qui allait au-delà des clivages politiques mais c’était surtout un formidable visionnaire pour notre territoire et un bosseur hors du commun. Il va indéniablement nous manquer.
Sa dernière venue dans notre commune remonte au 26 mai dernier, il était venu inaugurer les 26 logements aidés rue Henri Cadot, l’un des programmes cofinancés par la communauté urbaine d’Arras.
David HECQ
Maire d’Anzin-Saint-Aubin
Vice-président de la Communauté Urbaine d’Arras