La salle Notre Dame : les raisons du fiasco
Tout ça pour ça…
C’est en substance ce que pensent de nombreux Anzinois, consternés par la gestion du dossier de la salle Notre Dame. Pendant des mois, nous avons eu dans notre commune une pollution visuelle qui a terni notre image.
« Qu’est-ce qui se passe à Anzin, on construit une centrale thermonucléaire ? C’est une barricade de gilets jaunes ? » Autant de quolibets qui sont arrivés à nos oreilles et qui ne font pas plaisir à entendre. La mairie a laissé faire pendant plus de cinq mois avant de faire du rétropédalage, sentant que le vent tournait… Au final on apprend par la Voix du Nord que le projet tant décrié verra pourtant le jour.
Comment en sommes-nous arrivés là ?
Pourquoi une telle pantalonnade alors que pas moins de trois élus sont indemnisés pour gérer l’urbanisme communal : Mme El Hamine, M. Jean-Pierre Julien, maire-adjoint en charge des finances et de l’urbanisme et Anne-Lise Lengrand, conseillère déléguée à l’urbanisme.
On pouvait donc penser que la convergence de leurs compétences supposées aboutirait à une solution rapide au problème qu’ils ont eux-mêmes créé.
En lieu et place d’une solution alternative motivée par l’intérêt public (réhabilitation en salles associatives, en chambres d’hôtes ou en ferme pédagogique), on a pointé du doigt un investisseur anzinois. Pendant près de six mois, on a laissé fleurir des banderoles sans queue ni tête pour défendre un « cœur de ville » complètement fictif.
Dans ce quartier bordant le golf, on dénombre pas moins de cinq immeubles à proximité immédiate du projet (immeubles initiés du temps où Mme El Hamine était aux responsabilités, faut-il le préciser).
En quoi un nouvel immeuble, beaucoup moins imposant en taille, viendrait rompre l’architecture locale ?
On peut comprendre que des personnes soient mécontentes de voir leur environnement immédiat évoluer. C’est humain et nous aurions tous la même réaction. Cependant la méthode employée n'est pas la bonne et les riverains ont eu de la chance d'avoir comme interlocuteur un homme ouvert au dialogue qui n'a pas imposé par la force ce que la loi l'autorisait à faire. Il a privilégié le dialogue et c'est tout à son honneur. Saluons également l'attitude constructive et positive de certains riverains qui ont compris la légitimité de son projet.
Malheureusement chacun le sait, nous ne sommes propriétaires que de notre parcelle et pas de la vue qui va avec.
Le droit à autrui de construire ce qu’il veut sur sa propriété est inaliénable tant qu’il respecte les règles du PLUI (Plan Local d’Urbanisme Intercommunal).
D’ailleurs en parlant du PLUI, on peut déplorer que si peu de personnes ont exprimé leur avis quand la CUA a organisé pas moins de six réunions publiques lors de son élaboration.
C'est un mal bien Français : aujourd’hui les gens s’offusquent des hauteurs et des nouvelles autorisations de construire mais quand ils en avaient l’occasion, ils ne se sont pas exprimés. Rappelons que le processus du PLUI a été lancé en 2013…
Quant à l’opposition dont faisait partie Mme El Hamine, elle a approuvé ces règles d’urbanisme à l’unanimité le 6 février 2019 (voir le compte-rendu du conseil municipal). D’autre part aucune réserve n’a été émise de leur part lors de l’enquête publique. Et pour cause : on ne peut pas approuver d’un côté et désapprouver de l’autre. Il est tellement plus facile de faire porter le chapeau à l’ancienne municipalité…
Toujours est-il qu’une fois élue, la nouvelle équipe s’est retrouvée aux responsabilités. Après avoir ameuté tout le monde en disant « vous allez voir ce que vous allez voir ! Cela ne va pas se passer comme ça… », on a convoqué cet entrepreneur anzinois à une réunion publique où il a été confronté à des riverains furieux, certains comparant même son projet à « un blockhaus ».
Le tout avec la bienveillance des nouveaux élus, « outrés de découvrir un tel projet » et se défaussant de leurs nouvelles responsabilités en disant en chœur « c’est pas de notre faute, c’est celle de l’ancien maire ».
Les faits, rien que les faits :
Jusqu’à preuve du contraire : il n’est pas interdit de déposer une demande de permis de construire en mairie. Le PLUI a été approuvé en décembre 2019, il n’est pas anormal que le propriétaire dépose un nouveau projet en février 2020.
La nouvelle équipe reproche à l’ancien maire de ne pas avoir communiqué auprès de la population et parle d’un « dossier construit dans l’opacité » (voir DASA n°105).
Premier point : le secret de l’instruction. Tant qu’un permis n’est pas approuvé, il est couvert par le secret de l’instruction. Une fois le permis accordé, il est opposable au recours des tiers. Visiblement cette notion de confidentialité échappe complètement à nos trois nouveaux experts de l’urbanisme. Si toutes les demandes des Anzinoises et Anzinois sont étudiées de la même manière, ça promet ! Car si on suit leur raisonnement, cela veut dire que l’on va consulter vos voisins avant de vous accorder le droit de construire chez vous !
Second point : nous n’avons rien construit dans l’opacité car ce n’est pas un projet communal, c’est un projet privé comme il en existe tant d’autres. Il a été déposé dans les règles de l’art en mairie comme tout un chacun. En ce qui nous concerne, nous aurions instruit le dossier dans le plus strict respect de la légalité et de l’appel d’offres (avec notamment la création d’un cabinet médical – voir plus bas). Certainement pas un traitement de l’urbanisme à géométrie variable.
Quand il s’agissait d’un projet public, nous avions organisé des réunions publiques. Deux exemples :
- L’implantation de l’antenne-relais prévue au squash par l’équipe dont faisait partie Valérie El Hamine. Suite à la réunion publique, les riverains ont été entendus et l'implantation a été rejetée.
- Tennis de l'Abbayette. Là encore la municipalité a suivi les inquiétudes des riverains et le projet immobilier a été refusé. La commune s'est portée acquéreur du site et envisageait d'y créer une résidence pour les seniors.
Dans la foulée une association de sauvegarde du patrimoine est créée et des banderoles fleurissent.
Certains se questionnent et se demandent s’il ne s’agit pas d’une association politique car sur la photo de famille publiée dans la Voix du Nord, on retrouve : Philippe Salomé, ancien maire (et donc ancien colistier de Valérie El Hamine), Jean Bonnier (ancien adjoint de Philippe Salomé), Brigitte Cat (ancienne colistière de Philippe Salomé) et Christine Petit (colistière de Philippe Salomé et de Valérie El Hamine en 2008).
D’ailleurs le hasard fait bien les choses… Mme El Hamine propose lors du conseil municipal du 16 juin 2020 : Philippe Salomé, Jean Bonnier, Christine Petit comme candidats pour siéger en tant que commissaires à la commission communale des impôts directs.
Une commission qui étudie les nouvelles constructions (et les modifications de construction) afin de définir leur niveau de taxation.
Au final : non seulement le projet verra le jour mais à la demande de la nouvelle municipalité, il se retrouve amputé de ce qui faisait sa force : la création d’un cabinet médical en rez-de-chaussée.
Le motif évoqué : la patientèle va occuper des places de stationnement sur la voie publique…
Que penser de cette affaire qui vire au fiasco total ?
En premier lieu qu’il y a deux poids, deux mesures dans notre commune.
Nous avions déjà évoqué le sujet ici-même en évoquant le fait que des ânes étaient mieux considérés que des Anzinois. Depuis cet article, d’autres constats sont venus étoffer cette pensée :
- Un projet de lotissement est en cours rue des Courlis. Est-ce que les riverains du quartier de l’Argillière ont été conviés à la réunion des riverains ?
Non ! Seuls les voisins immédiats (rue des courlis, rue des Mouettes) ont été conviés à voir une présentation du projet. Les habitants des rues Loriots, Argillière, Square des Vanneaux qui seront tout autant impactés par le trafic routier de ce nouveau projet ont été priés de rester chez eux…
- L’aménagement du nouveau parking des Louez-dieu, mené tambour-battant en quelques mois par Jean-Pierre Julien a-t-il fait l’objet d’une information auprès des résidents des Hauts-de-Scarpe, pourtant fortement impactés par le trafic généré par un collège en pleine expansion ?
Les entreprises de la Zone d’Activités des Filatiers, elles aussi impactées par les nombreux agrandissements du collège, au point de prendre des rendez-vous avec leurs clients en dehors des heures d’entrée et sortie des élèves, ont-elles été averties ?
De même nous n’avons aucune visibilité sur le devenir du terrain de football, propriété du collège et situé en zone constructible. Les aménagements routiers réalisés cet été laissent à penser qu’ils desserviront tôt ou tard une nouvelle structure. Là encore on ne connait pas les intentions de l’enseignement catholique, ni celles de la mairie.
La chronologie des faits
Avant tout chose il faut préciser ce que l’on appelle la salle Notre Dame. Il s’agit d’un ensemble composé d’une habitation ancienne sur laquelle s’est greffée une salle pouvant accueillir une cinquantaine de personnes.
L’association AEP l’Anzinoise, association d’enseignement catholique, était propriétaire de la salle Notre Dame suite au don de son ancien propriétaire. La seule condition de ce don était d’y organiser le catéchisme des enfants.
Il y a une vingtaine d’années, l’association est confrontée à des problèmes d’entretien de la salle, devenue vétuste et hors normes. Elle demande à la municipalité d’en faire l’acquisition avec une clause dans l’acte de vente spécifiant qu’une salle pour le catéchisme doit être assurée par la mairie.
La municipalité fait l’acquisition du bâtiment en 2002 mais ne l’entretient pas. Pendant plusieurs années le bâtiment reste en l’état et ne fait plus l’objet de location auprès du public. De plus un locataire âgé occupe le logement et ne souhaite pas le quitter.
L’équipe municipale de l’époque (dont faisait partie Mme El Hamine) projette d’y faire des salles associatives mais six ans après son acquisition, ce projet tarde à voir le jour.
En 2008, David Hecq et son équipe sont élus.
Le nouveau conseil municipal décide de regrouper en un seul endroit médiathèque et salles associatives. La transformation de la salle Notre Dame telle qu’elle était envisagée est trop coûteuse (pas loin de 400 000 €). Il est donc décidé de vendre le bâtiment et de reloger le locataire. La création de la résidence senior de Pas-de-Calais Habitat permettra de répondre à ce dernier point.
Pour céder ce bâtiment, il faut l’accord du conseil municipal. Une délibération est donc prise. Mme El Hamine, alors dans l’opposition n’émet aucune objection.
Cependant la mairie ne peut pas vendre au prix qu’elle souhaite les biens communaux. L’estimation du bâtiment est donc faite par les services fiscaux (Pôle d’évaluation domaniale), seule autorité compétente en la matière.
Une fois le prix fixé, une publicité est faite pour céder le bien. Plusieurs promoteurs immobiliers se manifestent mais la densité de logements est trop importante (22 logements) et esthétiquement le côté massif dénote avec l’environnement immédiat.
Des particuliers se manifestent ainsi que des jeunes médecins intéressés pour y faire leur cabinet médical. Toutefois deux freins apparaissent à toute éventuelle cession :
- Prix jugé trop élevé
- Présence d’amiante dans les tôles en fibre de l’extension
Faute d’acquéreurs, la municipalité demande une nouvelle estimation du Pôle d’évaluation domaniale. Parallèlement elle fixe de nouvelles règles dont celle requérant l’implantation d’un cabinet médical.
Une nouvelle publicité est faite. L’ouverture des offres se fera par une commission où siégera l’opposition. Les plis déposés sont cachetés et mis dans le coffre-fort de la mairie.
Aucun élu, même le maire, n’y a accès.
Au final c’est l’actuel propriétaire qui remporte l’appel d’offres. Nous sommes en 2017.
Bien évidemment, à l’époque, Madame El Hamine ne manifeste aucune objection. La vente a donc lieu et le propriétaire dépose une demande de permis de construire quelques mois après.
En décembre 2019, le Plan Local d’Urbanisme Intercommunal est approuvé par la Communauté Urbaine d’Arras. Il abroge les PLU communaux et fixe de nouvelles règles.
Ainsi la salle notre Dame se trouve dans une zone UAb définie comme suit :
Le secteur UAb correspond aux centres-villes et secteurs à enjeux des communes urbaines et des pôles-relais de la communauté Urbaine d’Arras.
Initialement la hauteur autorisée dans le PLUI était de 14 mètres. Lorsqu’il était maire, David Hecq a œuvré au sein de la CUA pour réduire cette hauteur sur le périmètre communal, tout comme d’autres maires. Ainsi des communes comme Dainville, Maroeuil ou la nôtre disposent d’une hauteur spécifique ramenée à 12 mètres au faîtage ou 10 mètres avec un acrotère.
Avez-vous souvenir des interventions de Mme El Hamine lors des six réunions publiques organisées par la CUA ?
Normal elle n’a formulé aucune objection…
Ce PLUI a été approuvé par la commune lors du conseil municipal du 6 février 2019.
Bien évidemment Mme El Hamine a voté favorablement. Vous pouvez le vérifier facilement en vous rendant sur le site communal.
En ayant connaissance de tous ces éléments, peut-on légitimement porter des griefs contre un investisseur anzinois qui revoit sa copie en tenant compte des nouvelles dispositions réglementaires, adoptées par l’ensemble des conseillers municipaux ? Jusqu’à preuve du contraire la liberté d’entreprendre n’est pas interdite.
On ne peut donc que condamner l’incroyable hypocrisie des élus qui font mine de découvrir les règles d’urbanismes applicables chez nous alors qu’ils les ont votées !
En ce qui nous concerne, une chose est certaine : nous n’aurions pas dérogé aux règles de l’appel d’offres. Un cabinet médical est même primordial pour notre commune car en l’espace de quelques années, nous avons perdu les cabinets de Mme Thépot et de M. Wagon.
Nous avions même envisagé une stratégie pour inciter des jeunes docteurs diplômés à s’implanter chez nous : prendre en charge le coût du loyer la première année puis à partir de la seconde année mettre en place une facilité d’acquisition avec le propriétaire.
Tout le monde n’a pas les moyens de se déplacer dans une autre commune et bon nombre de docteurs ne prennent plus de nouveaux patients. Nous sommes persuadés que cela aurait été un bon moyen, d’une part, de lutter contre la désertification médicale dans notre commune et d’autre part de soutenir l’activité de notre pharmacie.
Par le passé, nous avons toujours accompagné l’implantation de nouvelles activités sur notre commune ou lutter pour leur maintien. Les exemples ne manquent pas : coiffeur, boulangerie, office notarial, superette, professions libérales, etc.
Aujourd’hui quelle est la stratégie de la municipalité pour remplacer le départ du Crédit Agricole de notre commune ? S’il y en a une, nous ne la connaissons pas…
En conclusion, on ne peut que déplorer la gestion calamiteuse de ce dossier : brouhaha médiatique et stérile, mise à l’index d’un investisseur anzinois, pollution visuelle pendant de nombreux mois qui détériore l’image de notre commune, abandon du cabinet médical, absence de solution alternative, frais juridiques pour défendre la commune au tribunal administratif, etc.
Dans ce type de sujet, la modération et la mesure doivent être de mise. Tout doit être mis à plat pour définir une réelle volonté politique. Si la nouvelle municipalité souhaitait récupérer cette salle pour mener un projet de son programme électoral (marché local, repair café, etc.), des outils juridiques existent.
En tout état de cause, ce qui prime avant tout c’est le dialogue et la concertation, certainement pas de mettre à l’index un anzinois et de jouer double jeu avec les autres.
La division n’apporte jamais rien de bon. Malheureusement nous en avons eu une flagrante démonstration et beaucoup d’Anzinois demeurent aigris d'une telle gestion.